A l’instar des réformes des contrats d’échange sur le risque de crédit à venir, tout changement n’est pas malvenu

On ne compte plus les analyses sur l’incidence présumée de la crise financière sur l’économie mondiale et les marchés financiers. Les analyses de son impact sur les gérants de fonds obligataires sont beaucoup plus rares. Afin d’en quantifier les conséquences, nous avons ressorti quelques vieilles photos des membres de l’équipe obligataire M&G d’avant et d’après la crise. Ces photos montrent clairement les effets néfastes de la crise.

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TIl est cependant des changements bénéfiques. Le mois de septembre sera marqué par une évolution résolument positive des règles régissant les contrats d’échange sur le risque de crédit (credit default swaps – CDS) portant sur les titres de créance émis par des établissements bancaires.

Les règles et définitions régissant les CDS édictées en 2003 disposent que trois événements de crédit concourent à l’activation des CDS sur les obligations d’entreprise et les obligations émises par des établissements financiers : 1. l’incapacité à rembourser 2. la faillite et 3. la restructuration (c’est-à-dire le fait qu’une entreprise ne puisse pas modifier les conditions régissant le remboursement de sa dette d’une manière susceptible de nuire aux investisseurs). En cas de survenance d’un des événements susmentionnés, les détenteurs d’une protection sont indemnisés à hauteur de la valeur nominale de leur participation par le vendeur de la protection (et les vendeurs de la protection versent un montant équivalent à la valeur nominale de la participation minorée du montant de la valeur résiduelle des obligations en souffrance, de sorte qu’ils se retrouvent dans la même situation que s’ils étaient les détenteurs des obligations en souffrance). En cas de survenance d’un des événements susmentionnés, les acheteurs de protection sont « assurés » contre les pertes encourues sur les obligations.

Cependant, si le processus décrit ci-dessus s’opère sans encombre dans la plupart des cas de défaut d’entreprise, nous avons observé au cours des dernières années plusieurs cas de défaut d’établissements bancaires dans lesquels les investisseurs obligataires détenteurs d’une protection ont dû faire une croix sur leur dû. Dans un souci de concision et de pertinence, j’aimerais évoquer deux des cas les plus récents afin de mettre en lumière les vices des CDS tels qu’ils existent à l’heure actuelle et les améliorations qui y seront apportées sous peu.

Début 2013, le gouvernement néerlandais expropriait les détenteurs d’obligations de SNS Bank après que celle-ci se soit empêtrée dans de sérieuses difficultés financières. Les détenteurs d’obligations se sont dès lors vu refuser le versement du coupon ou du capital initialement investi et le comité de résolution a statué, de manière très simple, qu’il s’agissait là d’une restructuration. Cependant, les détenteurs d’une protection ont dû remettre les obligations en souffrance aux vendeurs et, dans la mesure où il n’y avait plus d’obligations subordonnées, ils ont dû se délester d’obligations senior dont la valeur s’établissait à environ 85 pence par livre sterling. En d’autres termes, les investisseurs détenaient des obligations d’une valeur nulle et ont été indemnisées à hauteur de 15 pence par livre sterling au titre de la protection qu’ils avaient achetée.

L’exemple le plus récent de CDS sur des obligations subordonnées n’ayant pas fait leur office concerne un cas de défaut toujours d’actualité : Banco Espirito Santo. Tous les actifs de qualité, les dépôts et les titres de créance senior de la banque portugaise ont été circonscrits au sein d’une nouvelle banque saine créée pour l’occasion et tous les actifs toxiques ainsi que toutes les obligations et actions subordonnées ont été conservés au sein de l’ancienne banque dysfonctionnelle. Ainsi, il est très probable que les titres de créance subordonnés ne verront leur cours se redresser que très lentement (les obligations subordonnées se négocient à l’heure actuelle à un cours avoisinant les 15 centimes). Les banques européennes sont techniquement en mesure d’absorber les pertes qu’elles encourent sur leurs obligations subordonnées et la dépréciation des actifs découlant d’un événement de défaut. Les obligations senior émises par les établissements bancaires pourront également être dépréciées à compter du début de l’année 2016, mais jusqu’à présent les législateurs et les régulateurs n’ont eu de cesse de vouloir préserver la valeur des titres de dette senior. Dans le cas de Banco Espirito Santo néanmoins, le fait que tous les dépôts et titres de dette senior seront placés auprès de la banque saine (avec une tranche très fine d’obligations subordonnées) signifie que 75% du passif de l’ancienne banque sera inscrit au bilan de la nouvelle entité. Cela veut dire que les CDS porteront désormais sur la dette de la nouvelle entité. Dès lors, les détenteurs de protection sur les titres de dette émis par BES se voient encore une fois contraints d’essuyer des moins-values significatives sur les obligations qu’ils détiennent et seront obligés de se délester d’obligations qui se négocient à l’heure actuelle à un cours proche ou supérieur à leur valeur nominale. Il ne s’agit pas là du scénario rêvé pour les détenteurs de protection ni, très sincèrement, d’une issue acceptable.

Partant, il apparaît que les règles régissant les CDS financiers à l’heure actuelle ne sont pas appropriées. A compter du mois de septembre, de nouvelles règles seront adoptées, contribuant à améliorer de manière sensible les fondamentaux économiques de ces contrats. Dit simplement, elles permettront aux CDS d’offrir une protection similaire à celle offerte par les obligations senior et subordonnées, ce qui, soit dit en passant, était leur but premier. Deux changements majeurs seront introduits : un quatrième événement de défaut intitulé « Intervention de l’Etat » fera son apparition et la clause de défaut croisé sera abrogée. L’activation des CDS sur intervention de l’Etat signifie que dans des cas similaires à celui de SNS, lequel a vu les autorités gouvernementales déprécier la dette de la banque, les CDS seront activés. Parallèlement, les détenteurs de protection sur les obligations subordonnées qui seraient contraints de remettre au gouvernement néerlandais des obligations de valeur nulle au titre de l’expropriation seraient indemnisés à hauteur de la valeur nominale de leur participation par les vendeurs de protection. En vertu des règles actuelles, l’activation des CDS entraîne un événement de défaut à la fois sur les obligations subordonnées et sur les obligations senior. Cette clause sera supprimée dans le cadre de la réforme à venir. Ce qui signifie que dans le cas de Banco Espirito Santo, les CDS subordonnés seraient activés en cas de défaut de l’émetteur sur sa dette subordonnée et les CDS senior se déclencheraient en cas de défaut de l’émetteur sur sa dette senior. Contrairement aux changements que l’on peut voir sur les visages des membres de l’équipe de Bond Vigilantes, l’évolution des règles régissant les CDS nous semble être une bonne chose.

La valeur des investissements peut fluctuer et ainsi faire baisser ou augmenter la valeur liquidative des fonds. Vous pouvez donc ne pas récupérer votre placement d'origine. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.

Ben Lord

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