La hausse des cours des produits agricoles au début de l’année a suscité des inquiétudes quant à l’impact éventuel sur les prix de détail des produits alimentaires, en cas de poursuite de cette tendance. Heureusement, le prix des produits agricoles de base (café, sucre, blé, etc.) semble avoir opéré un découplage vis-à-vis de celui des ressources minières et minérales (or, argent, platine, etc.) ces derniers mois. En effet, les données des sept derniers trimestres indiquent que le cours de nombreux produits agricoles a en fait reculé, comme le montre le graphique ci-dessous.
Les cours du café ont désormais atteint leur niveau le plus bas en cinq mois, une fois apaisées les craintes de pénurie de grains de café en provenance du Brésil. L’offre de sucre a augmenté en glissement annuel, tandis que les cours du blé ont également chuté en raison des récoltes accrues et de la dissipation des préoccupations concernant les cultures.
Afin d’évaluer l’effet collectif de ces fluctuations de cours des produits agricoles et la manière dont elles pourraient se répercuter sur l’inflation au Royaume-Uni, j’ai élaboré un indice simple de gâteaux, en associant les données des cours mondiaux des matières premières à des recettes de base issues du site Web de BBC Good Food. Puisque les génoises et les pâtisseries individuelles constituent deux des éléments représentatifs du panier de marchandises IPC 2014, et que les produits alimentaires et les boissons représentent 11,2 % de l’indice global IPC, l’association de ces matières premières donne une indication de l’impact des changements futurs sur le consommateur moyen.
Le graphique ci-dessous affiche les résultats de l’indice des gâteaux, témoignant de la variation des coûts des diverses pâtisseries (depuis octobre 2012) par rapport à l’IPC au Royaume-Uni (en glissement annuel en %). Fait intéressant : la tendance générale à la baisse de tous les indices de gâteaux au cours des sept derniers trimestres. Les génoises et les scones nature semblent particulièrement avantageux ces derniers mois, compte tenu de la forte proportion de blé dans leurs recettes. Sans surprise, le gâteau aux pommes donne une indication de prix pour son principal ingrédient (le prix des pommes a reculé de 4 % depuis le début de l’année), tandis que le gâteau au café présente un effet moins prononcé, mais similaire. Bonne nouvelle (notamment pour les adeptes du gâteau au chocolat) : malgré l’augmentation persistante du coût du cacao, les cours des autres ingrédients du gâteau, tels que le sucre, le blé et l’huile de palme (utilisée comme alternative au beurre) ont tous suffisamment baissé pour compenser cette tendance, ce qui donne lieu à une réduction du prix du gâteau au chocolat ces derniers mois.
En dépit de la récente hausse de l’IPC en juin à 1,9 % en glissement annuel, en raison du décalage entre les cours des matières premières brutes et leur niveau de prix général, la déflation est susceptible de se répercuter sur les prix des gâteaux et sur les composants alimentaires de l’IPC au cours des prochains mois. Ainsi, même si on ne sait pas exactement qui a été le premier à déclarer « qu’ils mangent de la brioche ! », cette personne était peut-être sur la bonne piste. Personnellement, je recommanderais les scones (relativement bon marché).
Les investisseurs en crédit peuvent faire appel à plusieurs stratégies. Ceux qui recherchent une exposition aux créances peuvent acquérir les obligations d’un émetteur ou bien vendre de la protection via des swaps de défaut (credit default swaps – CDS) sur le même émetteur. Le différentiel de prix entre l’obligation d’entreprise et le contrat CDS peut faire la différence entre surperformance ou de sousperformance dans un contexte de spreads de crédit étroits et aux faibles rendements. En outre, le choix entre ces deux instruments peut s’appliquer à la totalité des obligations investment grade (IG) et des obligations à haut rendement de sorte que les investisseurs ont la possibilité de s’exposer au crédit dans leur zone géographique de prédilection (par exemple les États-Unis, l’Europe ou l’Asie). Les spreads de crédit américains et européens se sont fortement contractés et s’établissent à présent à leurs niveaux d’avant l’effondrement de Lehman Brothers. Aujourd’hui, en raison de cette convergence, la question pour les investisseurs en obligations IG internationales est de déterminer quel est le marché le plus attractif du point de vue de la valorisation.
Comparons tout d’abord le marché du crédit en EUR et en USD. La méthode la plus simple consiste à faire appel à deux indices de CDS. Ces indices regroupent 125 des CDS à 5 ans les plus liquides sur des entités investment grade (IG) en Europe (indice iTRAXX EUR 5Y) et en Amérique du Nord (indice CDX IG 5Y). Un examen de la performance historique de ces deux indices met en évidence que leur différentiel était très peu marqué jusqu’au début de la crise financière du second semestre 2007. Au cours de cette période, l’indice iTRAXX EUR s’échangeait à environ 10-15 points de base (pb) de moins que l’indice CDX IG. Au cours de la crise, le niveau absolu des deux indices a considérablement augmenté, mais l’indice iTRAXX EUR a surperformé l’indice CDX IG, celui-ci s’établissant à un niveau pic d’environ 230 pb à la fin 2008. Dans les trois années qui ont suivi, en raison de l’atténuation de la récession américaine et de l’émergence de la crise de la zone euro, l’indice CDX IG a surperformé l’indice iTRAXX EUR d’environ 120 pb.
Le différentiel entre les deux indices, qui s’établissait à – 64 pb en novembre 2008, est devenu positif en mai 2010 et a atteint la valeur record de 57 pb en novembre 2011. Avec l’apaisement de la crise de la zone euro, l’indice iTRAXX EUR a de nouveau surperformé l’indice CDX IG. Aujourd’hui, ce différentiel a pratiquement disparu (4 pb), et les deux indices se sont contractés à environ 65 pb à la fin mai, un niveau qui n’avait pas été enregistré depuis la fin de l’année 2007. L’indice iTRAXX EUR a continué à se resserrer en juin et s’est temporairement échangé via l’indice CDX IG pour la première fois depuis mars 2010.
Le fait de vendre de la protection à l’égard d’une entreprise au moyen de CDS crée une exposition au risque de crédit qui est assimilable à l’achat d’une obligation comparable du même émetteur. Aussi, pour un investisseur en titres à revenus fixes, il est utile de comparer la prime des CDS au spread de crédit des obligations au comptant. Leur écart de rendement est souvent désigné par l’expression « base des CDS ». Lorsque la base est positive (c’est-à-dire lorsque la prime du CDS est supérieure au z-spread de l’obligation), la rétribution du CDS sur une entreprise est plus élevée qu’une obligation de cette même entreprise pour un risque de crédit identique, et inversement lorsque la base est négative.
Effectuer une comparaison directe, à données comparables, entre indices de CDS et indices d’obligations d’entreprise peut se révéler complexe. Ainsi, il est impossible de trouver des obligations au comptant en circulation pour toutes les entreprises qui composent les indices de CDS. En outre, ceux-ci comportent des contrats d’une certaine maturité (5 ans) et sont reportés tous les six mois alors que les obligations au comptant s’approchent d’une maturité prédéfinie et sont finalement remboursées, à supposer qu’elles ne soient pas des instruments perpétuels et que leur émetteur ne soit pas défaillant.
Nous avons abordé ce problème en construisant nos propres indices non financiers de CDS et d’obligations au comptant, tant pour les émetteurs des États-Unis que de la zone euro. Pour les émetteurs en EUR, nous sommes partis de la liste actuelle des entreprises de l’iTRAXX EUR. Nous avons classé celles-ci en fonction du volume total de leur dette impayée et avons sélectionné les 20 premiers émetteurs non financiers de la zone euro ayant des obligations comparables en circulation (obligations senior non assorties de sûretés, de type classique, à échéance d’environ 5 ans, présentant un niveau de liquidité raisonnable, etc…) pour construire nos indices de CDS et d’obligations. Nous avons ensuite calculé les moyennes hebdomadaires des primes des CDS, des spreads des obligations au comptant et de la base des CDS sur les 20 sociétés composant les indices, ce depuis le début de l’année, et comparé leur évolution. Pour les indices en USD, nous avons appliqué la même stratégie en sélectionnant un sous-ensemble de 20 émetteurs non financiers américains dans la liste actuelle des émetteurs de l’indice CDX IG.
Le graphique ci-dessous présente les primes des CDS, les z-spreads des obligations et les bases des CDS des indices européen et américain. Sur toute l’année 2014, les quatre spreads des indices non financiers IG se sont resserrés. La base des CDS pour les créances non financières IG en USD est restée négative (-19 pb en moyenne). En termes absolus, la base négative en USD a diminué, passant d’entre – 30 et – 20 pb en janvier à – 11 pb au cours de la première semaine de juillet. En revanche, excepté au cours de la première semaine de janvier qui est susceptible de présenter des distorsions en raison des faibles volumes d’échange, la base des CDS IG non financiers en EUR a été positive (+ 12 pb en moyenne) et s’élève à + 11 pb pour la première semaine de juillet.
Plusieurs raisons ont été proposées pour rendre compte du contraste entre la base des CDS européens et celle des CDS américains. Certains mettent en avant le déséquilibre entre l’offre et la demande sur les marchés obligataires au comptant d’Europe, qui a pour effet d’ajouter une prime de rareté aux prix des obligations et ainsi d’anéantir leurs spreads. D’autres font valoir que les contrats CDS européens ont été principalement utilisés à des fins de couverture (achat d’une protection au moyen de CDS, destinée à réduire l’exposition au risque de crédit), tandis que les contrats CDS en USD ont été utilisés de façon plus équilibrée, tant pour augmenter que pour réduire l’exposition au risque de crédit.
Dans l’environnement de marché actuel, caractérisé par des rendements faibles et des spreads de crédit très serrés, le niveau de la base des CDS constitue un paramètre important. Le choix entre une obligation au comptant ou un dérivé de crédit est un autre levier que les investisseurs en titres à revenus fixes peuvent utiliser pour exploiter les opportunités de valeur relative. Grâce à la sélection soigneuse de l’instrument financier – obligation au comptant ou bien contrat CDS – il est possible d’obtenir une augmentation du rendement de dix points de base pour un risque de crédit équivalent. Lorsque la base est positive, le CDS est bon marché par rapport à l’obligation au comptant et inversement lorsque la base est négative. Ainsi, à l’heure actuelle, il est souvent très judicieux de s’exposer au risque de crédit IG en EUR en privilégiant les contrats CDS par rapport aux obligations au comptant lorsque la base des CDS est en territoire positif.
U.K. Asset Resolution (UKAR) a été fondée à la fin de l’année 2010 en tant que société holding de Bradford & Bingley (B&B) et de la section de Northern Rock restée propriété de l’État (NRAM). Contrairement à d’autres institutions ayant bénéficié d’un plan de sauvetage – RBS et Lloyds – et dont les progrès nous sont largement relayés par les médias, UKAR est quelque peu passée inaperçue. Pour donner une idée de l’ampleur du plan de sauvetage, même si aucune des deux entités n’a émis de prêt hypothécaire depuis 2008, UKAR reste aujourd’hui le 7e plus important prêteur hypothécaire du Royaume-Uni, avec un bilan de 74 milliards de livres sterling. Près d’un tiers des actifs inscrits au bilan d’UKAR sont liés aux opérations de titrisation RMBS des deux plates-formes Aire Valley (B&B’s) et Granite (Northern Rock). Par ailleurs, 26 % et 22 % des actifs correspondent à des prêts hypothécaires non grevés et à des obligations garanties, respectivement.
Ont-ils donc, oui ou non, fait bon usage de l’argent des contribuables ? Et peut-on espérer un retour sur investissement ?
La semaine dernière, nous avons rencontré la direction, qui nous a fait part de sa stratégie globale. Ils cherchent avant tout à aider ceux qui sont en mesure de refinancer leur prêt hypothécaire à un meilleur taux. Ils ont également expliqué que les procédures de recouvrement et de traitement des arriérés s’étaient améliorées. Cette tendance s’illustre ci-dessous par une forte diminution du nombre d’emprunteurs des deux opérations de titrisation n’ayant pas effectué de versement depuis plus de 3 mois.
Plus particulièrement, UKAR a développé une stratégie en trois volets correspondant à chacun des trois groupes d’actifs (RMBS, prêts hypothécaires non grevés et obligations garanties) :
- L’activité de RMBS pilote une stratégie qui consiste à lancer des appels d’offres sur des obligations onéreuses.
- L’activité de prêts hypothécaires non grevés vend des portefeuilles de prêts à des tiers qui souhaitent les titriser.
- L’activité d’obligations garanties réduit les échéances par des exercices de gestion du passif.
Concernant la réduction des arriérés, UKAR a su à la fois atteindre son objectif et dégager des bénéfices. Ce sont de ces bénéfices que nous, contribuables (ou gouvernement), tirons de la valeur. Contrairement à RBS et Lloyds, dans lesquelles le gouvernement a pris une participation en actions, les institutions présentées ici ont été entièrement nationalisées, et un prêt leur a été accordé. L’année dernière, UKAR a remboursé au gouvernement 5,1 milliards de livres de dettes et 1,1 milliard de livres d’intérêts, de frais et de taxes.
Autre point un peu plus technique : les structures de RMBS ont atteint une situation d’insolvabilité (déclenchement du « non-asset trigger »). Les obligations placées par UKAR doivent donc être remboursées par ordre de priorité, jusqu’à leur remboursement total. Une partie des fonds propres sera mise à la disposition du Trésor, soit environ 8 milliards de livres au total.
Dès lors, j’ose croire qu’ils prennent parfaitement soin de l’argent des contribuables. Je pense également que les exercices de gestion du passif commercial et les ventes de prêts de gros vont continuer à maximiser la valeur ajoutée. Sans oublier qu’aider les gens à rester dans leur maison est une bien belle opération.
La liquidité des marchés du crédit suscite un vif intérêt depuis quelques mois. La Banque d’Angleterre a prévenu que la faible volatilité des marchés financiers risquait d’entraîner une recherche excessive de rendement, le FT prétend que les autorités américaines envisagent des frais de sortie pour les fonds obligataires en cas de progression de la classe d’actifs ; et vous avez tous vu les graphiques illustrant le rebond des actifs des fonds d’obligations d’entreprises simultanément avec la réduction des capitaux alloués par Wall Street aux opérations sur obligations. Dès lors, il convient de s’interroger sur les raisons qui font que la liquidité des marchés des obligations d’entreprises inquiète plus que celle des marchés d’actions ? Il est deux raisons qui explique cette aversion. D’abord, les marchés des obligations d’entreprises sont extrêmement fragmentés, avec des sociétés qui procèdent à des émissions aux échéances, devises et structures multiples, contrairement aux marchés actions où il y a en général une ou deux lignes d’actions par société. Ensuite, les actions se négocient en bourse, et les teneurs de marché s’engagent à acheter et à vendre des actions quelles que soient les conditions du marché. Aucun engagement de ce genre n’existe sur les marchés du crédit : après une nouvelle émission, il peut y avoir d’autres offres comme il peut ne pas y en avoir – la liquidité future ne doit jamais être considérée comme acquise.
Comment faire pour que la liquidité des marchés du crédit et des obligations d’entreprises soit aussi bonne que celle des marchés d’actions ? Jetons d’abord un œil à la fragmentation. Si je saisis « RBS corp » dans Bloomberg, j’obtiens 1011 résultats. Soit 1011 différentes obligations RBS toujours en circulation. Ce qui représente 19 pages d’obligations individuelles, dans des devises allant du dollar australien au rand sud-africain. On trouve des obligations à taux variable, des obligations à taux fixe avec des coupons s’échelonnant de moins de 1 % à plus de 10 %, des échéances aussi bien immédiates qu’à perpétuité, des obligations indexées sur l’inflation, des obligations à remboursement anticipé (options intégrées) et divers niveaux de priorité en termes de structure de capital (dette senior, lower tier 2, upper tier 2, tier 1, droits préférentiels). Certaines de ces émissions n’ont quasiment plus aucune obligation en circulation, quand d’autres représentent un encours de plus d’un milliard de dollars. Chacune d’entre elles a un prospectus de plusieurs centaines de pages détaillant les caractéristiques, les protections et les risques précis de l’instrument. Je plains les stagiaires RBS du département des marchés de capitaux en charge des photocopies à 3 heures du matin ! L’un des moyens d’améliorer la liquidité des marchés obligataires est de faire le nettoyage dans les émissions obligataires. Une société émettrice, une action, une obligation.
Comment cela fonctionnerait-il ? Le seul moyen d’avoir une émission obligataire pleinement assimilée et qui puisse se répéter inlassablement est de la rendre perpétuelle. L’obligation liquide de référence de chaque société n’aurait aucune date de remboursement. Une société qui voudrait accroître sa dette devrait augmenter son émission obligataire, et une société qui voudrait rembourser sa dette devrait faire exactement la même chose que pour ses capitaux propres – annoncer au marché qu’elle rachète et annule ces obligations sur le marché ouvert.
Et le coupon ? Vous pourriez décider de n’avoir que des obligations avec un coupon de 5 %, au risque de voir les obligations valorisées à un cours sensiblement éloigné de leur valeur nominale (100) pendant de longues périodes dans un contexte de taux d’intérêt hauts ou bas. Mais rendez-vous compte des problèmes que cela entraînerait sur le marché des contrats à terme sur obligations si jamais il fallait modifier le coupon notionnel du contrat à terme en cas de renversement du contexte de taux d’intérêt. Pour cette raison – et dans un but que je vais vous présenter dans un instant – toutes ces nouvelles obligations à perpétuité verseraient un taux d’intérêt variable. Il s’agirait d’obligations à taux variable (FRN) à perpétuité. Et contrairement au marché actuel des FRN au sein duquel chaque obligation verse un coupon, par exemple le taux Libor ou Euribor plus une marge (auquel on déduit parfois une marge pour les émetteurs particulièrement solides), toutes les obligations se contenteraient de verser le taux Libor ou Euribor. Si toutes les obligations d’entreprises avaient la même (non-)échéance et versaient exactement le même coupon, noter la solvabilité perçue deviendrait un jeu d’enfant – il vous suffirait de connaître le prix. Les faibles titres à haut rendement se négocieraient bien en dessous du pair, et les obligations supranationales notées AAA, comme celles de la Banque mondiale, bien au-dessus.
Mais vous allez me dire : Et si moi, investisseur final, je ne veux pas de flux de trésorerie à taux variable à perpétuité ? Eh bien, vous pourriez ajouter de la duration (risque de taux d’intérêt) sur les marchés très liquides des obligations d’État ou des contrats à terme sur obligations, et avec des obligations d’entreprises désormais extrêmement liquides, vendre un instrument permettrait à un investisseur de générer un produit de remboursement suffisant pour financer un passif. Le véritable avantage de ces nouveaux instruments versant tous des taux d’intérêt variables, c’est qu’ils pourraient être combinés avec le marché des produits dérivés financiers le plus liquide au monde, à savoir le marché des swaps. Un investisseur serait en mesure d’échanger des flux de trésorerie à taux variable contre des taux de trésorerie à taux fixe. Cela arrive déjà à grande échelle chez la plupart des gestionnaires d’actifs. Créer des marchés d’obligations d’entreprises plus importants et plus actifs rendrait cela monnaie courante – les marchés des swaps deviendraient encore plus importants et liquides si l’unique FRN à perpétuité de chaque société était adaptée à l’exigence de devise et de duration de l’investisseur final (ou que la société pouvait adapter ses besoins de financement de la même façon que beaucoup le font déjà). Les investisseurs pourraient même créer des flux de trésorerie indexés sur l’inflation avec la progression du marché des swaps sur IPC.
Quels sont donc les problèmes et les objections à tout ceci ? lls sont nombreux, notamment de la part des papeteries et des fabricants de prospectus et de pierres tombales (les briques de Perspex distribuées à quiconque a contribué à l’émission d’une nouvelle obligation). Mais l’augmentation de l’activité de swap renforcera les besoins de garanties (liquidités, obligations d’État) au sein du système et pourrait accroître les risques systémiques face à la complexité accrue du marché. La collatéralisation et les places boursières devraient réduire ces risques systémiques. Autre problème lié à la fiscalité – les émetteurs compulsifs risquent de vendre leurs obligations avec d’importantes décotes par rapport à leur valeur nominale. Or les autorités fiscales n’apprécient guère (ils voient cette démarche comme un moyen d’éviter l’impôt sur le revenu), et cela signifierait pour les investisseurs d’être en mesure d’expliquer cette convergence vers le valeur nominale (« pull to par ») pour répondre d’un revenu plutôt que d’une plus-value. Enfin, même s’il me coûte de l’admettre, il se pourrait qu’il y ait 2 émissions obligataires différentes pour les banques et les financières. Une pour le risque senior, une pour le risque associé aux obligations convertibles subordonnées (CoCo). Pour ce faire, il faudrait que les autorités créent une structure standard, avec un mécanisme de déclenchement et de conversion du capital. À l’heure actuelle, il existe plusieurs niveaux de déclenchement du capital, et certaines obligations se convertissent en actions quand d’autres absorbent la totalité du principal. La complexité est telle qu’une récente étude de RBS sur les investisseurs obligataires a montré que 90 % d’entre eux considèrent qu’ils ont une meilleure compréhension des CoCos que le marché lui-même.
Concernant la seconde différence entre les obligations et les actions, il faudrait également que les banques d’investissement s’orientent vers une négociation boursière du crédit et qu’elles prennent en charge l’obligation de tenue de marché pour les courtiers qui gèrent les transactions obligataires. Cela n’empêchera pas les prix des obligations de chuter si les investisseurs décident de vendre en masse – mais il y aura toujours un prix. Cette liquidité accrue devrait contribuer à faire baisser les coûts d’emprunt des sociétés et atténuer les craintes d’une future crise du crédit systémique.
Nous savons à présent ce que la Banque d’Angleterre compte faire pour enrayer la hausse des prix constatée sur le marché de l’immobilier britannique, un marché dont le gouverneur Mark Carney a dit précédemment qu’il constituait le plus grand risque pour la stabilité financière et par conséquent l’expansion économique du pays (le FMI et la CE avaient émis une mise en garde analogue) : pas grand chose pour le moment. Même s’il peut observer d’un mauvais œil la hausse des prix de l’immobilier, Mark Carney s’est dit prêt à la « tolérer ».
Avant de s’interroger sur ce qu’il convient de faire (et de ne pas faire) pour contenir la hausse du marché de l’immobilier britannique, il est utile de se demander si ce marché est dans une phase de « bulle ». La question n’est pas aussi insensée qu’on pourrait le penser : en valeur réelle (autrement dit après correction des effets de l’inflation), les prix de l’immobilier au Royaume-Uni n’ont progressé que de 1,2 % par an de 1974 à la fin de l’année 2013, et de 2,2 % par an entre 1974 et la fin de l’année 2007. C’est au début des années 2000 que la situation s’est emballée, avec une croissance à deux chiffres des prix réels de l’immobilier durant quatre années consécutives entre 2001 et 2004. Si l’on exclut ces années, la croissance des prix réels de l’immobilier au Royaume-Uni a en fait été négative au cours des quatre dernières décennies*. Mais même en incluant la période 2001-04, si l’on tient compte du fait que la productivité britannique a progressé en moyenne de 1 % par an depuis le milieu des années 70 et que la croissance démographique a atteint 0,3 % par an en moyenne durant cette période, une légère croissance des prix réels de l’immobilier ne semble pas particulièrement inquiétante.
Cela étant, l’évolution moyenne des prix sur une période de 40 ans ne suffit pas à dresser un tableau complet. La performance enregistrée par le marché de l’immobilier depuis le début de l’année est remarquable : d’après Nationwide, les prix ont progressé de 11,1 % en valeur nominale entre janvier et mai, ce qui est encore loin des niveaux enregistrés lors de la bulle des années 2001-04, mais qui représente la plus forte hausse depuis cette période. Parallèlement, les données de l’ONS indiquent que les prix nominaux de l’immobilier à Londres ont bondi de 18,7 % entre janvier et avril. Ces taux de croissance sont nettement supérieurs à l’inflation et à la hausse des salaires.
Quelle est la cause de cette hausse marquée des prix de l’immobilier ? Par définition, la réponse est soit un excès de demande, soit une offre insuffisante, bien que la plupart des commentaires concernant le marché de l’immobilier britannique semblent pointer vers une insuffisance de l’offre plutôt qu’une trop forte demande. Le débat public concernant l’immobilier britannique a été fortement influencé par le rapport publié par Kate Barker (ex membre du Comité de politique monétaire) à la demande du gouvernement en 2004 et portant sur l’analyse de l’offre immobilière, rapport dans lequel elle déclarait que « la tendance haussière à long terme des prix de l’immobilier et les récents problèmes d’accessibilité témoignaient de façon claire d’une pénurie de logements au Royaume-Uni » et que le Royaume-Uni devait construire jusqu’à 260 000 nouveaux logements par an pour répondre à la demande. Dans la décennie qui a suivi la publication de ce rapport, le nombre de nouveaux logements construits chaque année n’a pas atteint la moitié de ce chiffre, ce qui suggère que la pénurie de logements a atteint le chiffre de 1 million.
Mais cette flambée des prix de l’immobilier est-elle réellement due à l’insuffisance de l’offre ? Comme le souligne le cabinet Fathom Consulting, s’il y a une réelle pénurie de logements, pourquoi les loyers réels n’ont-ils pas augmenté ? Le graphique ci-dessous indique la croissance des salaires nominaux par rapport aux loyers britanniques depuis 2001 : on constate que les loyers progressaient à un rythme inférieur à celui des salaires avant 2008 et qu’ils n’ont progressé plus récemment qu’à un rythme légèrement supérieur à celui des salaires. Si l’offre était insuffisante, on devrait constater une hausse marquée des loyers réels dans la mesure où les ménages sont contraints de consacrer une part plus importante de leurs revenus au logement, or ce n’est pas le cas.
Le graphique suivant suggère que la hausse des prix de l’immobilier engagée l’an passé est nettement plus susceptible (comme d’habitude) d’être liée à la demande, c’est-à-dire à la baisse des taux hypothécaires et à la facilité de contracter un emprunt immobilier. Le graphique de gauche, issu du récent Rapport de stabilité financière publié par la Banque d’Angleterre, indique le ratio d’endettement des ménages ayant contracté un nouveau prêt immobilier. Environ 10 % des nouveaux bénéficiaires de prêts empruntent aujourd’hui à un ratio d’endettement supérieur ou égal à 4,5 fois le revenu. Plus de la moitié des acheteurs doivent emprunter + de 3 fois leur salaire, un ratio qui est 5 fois plus élevé qu’au début des années 90, juste avant l’effondrement du marché de l’immobilier britannique. Il est frappant de constater l’étroite corrélation entre les ratios prêt/revenus (graphique de gauche) et les prix de l’immobilier (graphique de droite). Cela suggère que le fait de limiter les ratios d’endettement permettra également de limiter la hausse des prix de l’immobilier, bien que la corrélation n’implique pas nécessairement l’existence d’un lien de causalité. Il se pourrait qu’une hausse supplémentaire des prix de l’immobilier contraigne les acheteurs à s’endetter davantage, seule solution possible s’ils veulent gravir le premier échelon de ce marché **.
Les investisseurs étrangers devraient constituer l’autre source de croissance de la demande en faveur des biens immobiliers au Royaume-Uni. Lorsque la livre sterling s’est effondrée suite à la crise de 2008, chacun pensait que le Royaume-Uni connaîtrait un mouvement de reprise induit par les exportations grâce à la nette amélioration de sa position concurrentielle. Malheureusement, cela n’a pas vraiment été le cas, le principal secteur d’exportation du pays (les services financiers) ayant été peu plébiscité après la crise. Les exportations britanniques ont initialement progressé, mais elles ne dépassent aujourd’hui que de 10 % leur sommet de 2008 et stagnent depuis 2011. En comparaison, les exportations espagnoles sont presque 30 % supérieures aux niveaux de 2008 en euros, et ce, malgré le raffermissement de l’euro par rapport à la livre sterling durant la période.
Si la dépréciation de la livre sterling ne s’est pas traduite par une hausse des exportations de biens et de services britanniques, elle semble avoir stimulé l’apparition d’un nouveau type d’exportation : le parc immobilier londonien. L’agent immobilier Savills estime à plus de 7 milliards de livres sterling la participation des investisseurs étrangers dans le marché des biens immobiliers résidentiels de prestige à Londres en 2012, et on peut supposer qu’elle est encore plus élevée en 2013. Les acheteurs étrangers ont toujours été attirés par l’immobilier londonien en raison de la transparence du marché, de sa liquidité, de la stabilité politique du pays, de la prééminence du droit, de la qualité du système éducatif et du faible niveau d’imposition par rapport à des pays comme la France ou l’Espagne, mais les flux de 2012 représentent le double des volumes enregistrés en 2008 ou en 2009, et environ un tiers de plus qu’en 2006.
À la lueur du graphique ci-dessous, il est facile de voir pourquoi l’immobilier londonien attire les acheteurs étrangers. Les biens immobiliers britanniques sont loin d’être bon marché en devise locale, mais ils apparaissent considérablement moins chers du point de vue des acheteurs étrangers traditionnels, à l’exception des Russes. Du point de vue des investisseurs chinois, les prix de l’immobilier londonien restent inférieurs de 17,5 % aux sommets affichés en 2007 lorsqu’on les évalue en yuan.
La stratégie adoptée par la Banque d’Angleterre, qui vise à réduire la demande intérieure en faveur de l’immobilier au travers de mesures macroprudentielles comme la limitation des ratios prêt/revenus, devrait être le principal moyen de faire face aux effets déstabilisants de l’endettement lié à l’immobilier, et on peut considérer que la Banque d’Angleterre aurait pu intervenir davantage. Le fait de taxer les flux de capitaux étrangers sur le marché de l’immobilier britannique est nettement plus séduisant sur le plan politique, mais pourrait s’avérer hasardeux.
Les données recueillies la semaine dernière indiquent que le déficit courant du Royaume-Uni s’est légèrement résorbé au 1er trimestre 2014, mais que les chiffres ont été révisés à la baisse à 5,7 % du PIB pour le 4e trimestre 2013 et à 5,9 % pour le 3e trimestre, ce qui constitue un nouveau record inquiétant. Parmi les 5 pays émergents baptisés les « 5 fragiles », seule la Turquie affichait un déficit plus important au 4e trimestre.
Le déficit courant est un indicateur plus général de la balance commerciale d’un pays. L’important déficit du Royaume-Uni peut être attribué à divers facteurs (déficit commercial soutenu, dégradation de la balance des revenus susceptible de refléter en partie une hausse des rachats d’entreprises britanniques par des entreprises étrangères, et déficits budgétaires soutenus), mais plus généralement, les déficit courants chroniques sont révélateurs de problèmes de compétitivité. Le graphique ci-dessous montre qu’historiquement, une forte dégradation de la balance courante britannique a toujours précédé une crise de la livre sterling, suite à quoi la dépréciation brutale de la livre a rétabli la compétitivité du Royaume-Uni et, par voie de conséquence, sa balance courante. Si l’on considère que l’acquisition de nouveaux logements londoniens par des investisseurs étrangers ne diffère guère, en termes d’impact sur les comptes nationaux, de l’acquisition massive de whisky écossais par des acheteurs étrangers, le fait d’imposer les acheteurs étrangers de biens immobiliers à Londres (comme il est envisagé) reviendrait à imposer ses propres exportations ! Ce qui ne serait pas très judicieux avec une balance courante aussi fragile. Signalons au passage que la taxation des exportations est bien pire que le protectionnisme, qui s’accompagne généralement d’une taxation des importations.
Les contrôles macroprudentiels sont des mesures positives qui devraient permettre de modérer le phénomène d’octroi abusif de prêts immobiliers survenu au cours des 2 dernières années. En revanche, ceux qui désignent les facteurs liés à l’offre comme étant la principale raison de la hausse des prix n’ont qu’une vision partielle de la situation. Vu de l’étranger, l’immobilier britannique est bon marché et la demande restera vraisemblablement élevée auprès des acheteurs étrangers à la recherche de solides performances dans un contexte mondial de faibles rendements. Il convient également de se méfier des appels à la limitation des flux de capitaux étrangers sur le marché de l’immobilier britannique, celui-ci s’avérant être l’un des secteurs d’exportation britanniques les plus prisés. Bien entendu, si les mesures macroprudentielles ne parvenaient pas à calmer le marché, la Banque d’Angleterre pourrait toujours relever les taux d’intérêt (si tant est qu’elle se souvienne comment s’y prendre).
*Ce calcul se base sur l’indice britannique des prix de détail (IPD) et l’indice Nationwide des prix immobiliers au Royaume-Uni. Compte tenu des problèmes de méthodologie que présentent les données IPD et Nationwide, il convient de traiter ce calcul avec prudence. Par exemple, l’indice IPD britannique est en moyenne supérieur de 0,9 % à l’indice IPC (indice des prix à la consommation) depuis 1989. Par conséquent, l’appréciation des prix réels de l’immobilier doit être majorée de 0,9 % par an sur une base IPC.
**Il est probable que la récente hausse des prix de l’immobilier et des ratios prêt/revenus des primo accédants résulte en partie du programme d’aide à l’achat (ou « d’aide à la vente » comme nous l’appelions à l’époque). Cela étant, dans la mesure où fin mai, seuls 7313 logements avaient été vendus dans le cadre de ce programme et que la valeur totale des prêts soutenus par le programme s’élève à 1 milliard de livres sterling, il est clair que d’autres éléments entrent en jeu.
Les chiffres décevants de la croissance américaine devraient inciter la Banque d’Angleterre (Bank of England – BoE) à relever ses taux, et ce même si Mark Carney s’est montré prudent à ce sujet lors de son intervention devant le Treasury Select Committee. A ce stade, la BoE peut poursuivre sa politique de taux accommodante du fait de l’absence de pressions inflationnistes. Cependant, dans un contexte caractérisé par le recul du chômage, les premiers signes de hausse des salaires, l’augmentation des prix des logements et l’accélération de l’activité économique, l’inflation pourrait devenir une source d’inquiétude croissante pour les ménages et les marchés. Dans cette perspective, il nous semble judicieux en l’état actuel d’effectuer une comparaison entre les anticipations d’inflation des marchés et celles des ménages.
Les graphiques ci-dessous comparent le point mort d’inflation britannique lié à l’indice des prix de détail (RPI), qui permet de mesurer les anticipations d’inflation du marché, et l’enquête Inflation Attitudes Survey réalisée par Gfk NOP pour la Banque d’Angleterre (un sondage réalisé auprès de 1 900 personnes et comprenant neuf questions sur leurs anticipations en matière de taux d’intérêt et d’inflation). Il est important de noter que cette analyse compare l’inflation réalisée (variation sur un an en pourcentage) aux anticipations et aux points morts d’inflation tels qu’indiqués par les enquêtes deux ans auparavant.
Cette comparaison met en évidence plusieurs résultats intéressants :
Déflation surprise : tant l’enquête Gfk NOP que les points morts ont sous-estimé le taux d’inflation RPI effectif sur la période 2006-2008 (autrement dit, personne n’avait anticipé le choc inflationniste issu de la hausse des prix des matières premières et de l’énergie). En 2008, l’indice RPI au Royaume-Uni a progressé de 5,2% en rythme annuel alors que la hausse des cours du pétrole se répercutait sur la facture énergétique. Les anticipations du marché et des ménages faisaient globalement abstraction de cette augmentation, signe que le ciblage de l’inflation par la banque centrale conservait toute sa crédibilité.
En 2009, l’indice RPI britannique est passé en territoire négatif alors que l’économie mondiale plongeait dans la récession, obligeant la BoE à abaisser ses taux d’intérêt. Le marché a fini par intégrer le scénario d’une déflation, mais a attendu pour cela que l’indice RPI devienne négatif. En novembre 2008 par exemple, le point mort à deux ans s’établissait à -1,4% quand le taux d’inflation RPI effectif ressortait à 4,7% en novembre 2010. Les investisseurs qui ont acquis des obligations britanniques à deux ans indexées sur l’inflation juste après l’éclatement de la crise financière ont ainsi réalisé une excellente opération.
Pour les ménages tout comme pour les marchés, les périodes de déflation (et de récession) sont particulièrement difficiles à prévoir, car leurs anticipations dans les deux cas sont généralement fondées sur le niveau courant de l’inflation (et de la croissance).
Désencrage suite à la crise : les anticipations des ménages sous-estimaient globalement l’inflation réalisée jusqu’à l’éclatement de la crise financière mondiale, et la surestiment depuis qu’elle s’est achevée. Cette propension à sous-estimer ou surestimer alimente l’hypothèse selon laquelle la période de récession aurait amené les ménages à remettre en cause la détermination de la BoE à combattre l’inflation. Entre 2000 et 2009, les anticipations d’inflation à deux ans s’établissaient en moyenne à 2,5%. Depuis 2009, cette moyenne ressort à 3,4%, soit une hausse d’un point de pourcentage quasiment, témoignant d’une détérioration de la confiance quant à la stabilisation des prix et reflétant par ailleurs la hausse de l’inflation RPI post 2009.
Des prévisions étonnamment similaires : les anticipations d’inflation mesurées à l’aune des points morts et de l’enquête de la BoE ne diffèrent que légèrement sur la période considérée, l’écart le plus important (400 points de base) survenant en octobre 2008 suite à la faillite de Lehman Brothers. La raison tient probablement au dénouement forcé de positions longues sur l’inflation, allié au mouvement massif de « fuite vers la qualité » en faveur des emprunts d’Etat nominaux, lequel a provoqué une distorsion du taux d’inflation intégré par le marché. L’écart moyen durant la période (hors années 2008 et 2009) se limite à seulement 8 points de base. Néanmoins, les points morts semblent mieux anticiper l’inflation RPI, sachant que les enquêtes auprès des ménages sont habituellement effectuées chaque trimestre alors que les points morts se négocient et sont réévalués plus fréquemment. D’où leur plus grande capacité à appréhender les soubresauts et les points d’inflexion dans l’évolution de l’inflation.
Anticipations pour la période à venir : les ménages et les marchés s’attendent à ce que l’inflation RPI dépasse son niveau actuel de 2,6% d’ici deux ans. Sachant que le point mort d’inflation implicite s’établit à 2,7%, les obligations britanniques indexées sur l’inflation semblent relativement bon marché à l’heure actuelle.
Certes, les points morts sont loin d’être une mesure parfaite de l’inflation étant donné qu’ils incorporent l’inflation et les primes de risque. Cependant, leur capacité à prédire l’évolution future de l’inflation semble manifestement meilleure que celle des enquêtes menées auprès des ménages. Il ne faut pas en conclure que ces enquêtes n’apportent aucune information utile, et c’est la raison pour laquelle nous avons procédé l’an dernier au lancement de notre enquête M&G YouGov Inflation Expectations Survey. Les anticipations d’inflation des consommateurs affectent diverses variables économiques, telles que la confiance des ménages, les dépenses de consommation et les coûts unitaires de la main d’œuvre. Cependant, lors de points d’inflexion, à l’instar de celui auquel nous sommes peut-être confrontés aujourd’hui alors qu’un revirement de la politique monétaire se profile, l’instantanéité des points morts d’inflation pourrait constituer un avantage tel qu’il semble judicieux d’en suivre soigneusement l’évolution.