Point hebdomadaire sur l’actualité des marchés obligataires. Cette semaine, retrouvez Laura Frost et Matthew Russell.
Veuillez noter que cette vidéo n’est disponible qu’en anglais.
« Si vous valez la peine d’être sauvés, vous feriez bien de commencer à nager, ou vous coulerez comme une pierre, car les temps sont en train de changer » Bob Dylan
Bob Dylan ne pensait probablement pas que ses lignes s’appliqueraient aux distributeurs mondiaux près de 55 ans après les avoir écrites. Mais c’est pourtant bien le cas.
Les consommateurs sont en train de changer si rapidement leurs habitudes que toutes les marques et tous les distributeurs ne sont pas suffisamment agiles pour s’adapter à cette nouvelle réalité. En conséquence, quelques sociétés de renom ont déjà commencé à couler comme des pierres : Maplin, Toys R Us Royaume-Uni, New Look, Poundland, House of Fraser, Homebase, Carpetright, Marks & Spencer et Debenhams font partie des sociétés dont l’existence-même a été récemment remise en question.
Plus que jamais, les nouvelles générations et les personnes plus âgées achètent en ligne : Les recettes attendues d’Amazon pour 2018 sont trois fois plus élevées qu’il y a cinq ans. Elles sont portées par une croissance des ventes sur internet qui à l’échelle mondiale ne semble pas pouvoir être freinée. Le passage au commerce en ligne peut conduire à des faillites et à des restructurations. Cela pousse les distributeurs à réduire leurs espaces de vente et à améliorer leur offre sur internet pour survivre.
Certains pourraient être plus touchés que d’autres : même si le Royaume-Uni dispose du seul pur distributeur en ligne de denrées périssables (Ocado), les ventes de produits alimentaires sur internet restent relativement limitées dans ce pays, ce qui rend la transition numérique relativement moins douloureuse pour ce secteur que pour d’autres (comme on peut le voir sur le graphique).
Les biens de consommation courante, comme les grille-pains ou les télévisions, sont particulièrement touchés. En effet, les offres en ligne ont poussé les prix à la baisse jusqu’à un point où les marges plus faibles ne justifient plus les espaces physiques supplémentaires que certains distributeurs ont construits au cours des années.
L’acquisition par le britannique Sainsbury de Home Retail Group (HRG) a pour but de répondre à ce défi : le distributeur de produits alimentaires est en train de remplacer ses espaces non alimentaires qui perdaient de l’argent par des magasins rentables au sein de ses supermarchés. L’enseigne Argos, qui appartient à HRG, offre ainsi aux clients un accès à l’ensemble des produits figurant sur son catalogue de 1 600 pages. Ces produits sont stockés par l’enseigne en arrière-boutique, ce qui permet de rentabiliser au mieux l’espace. Ce mouvement vise à attirer davantage de clients et à augmenter les marges.
Les marques souffrent aussi
Les distributeurs ne sont pas les seules victimes de la transition numérique. Les marques souffrent aussi car les consommateurs suivent ceux qui créent de nouvelles tendances sur les médias sociaux. Ces derniers, à travers des plateformes comme YouTube, Instagram, Facebook ou Snapchat viennent concurrencer des sociétés bien établies et peuvent parfois engranger d’énormes succès en un temps record. Les consommateurs adorent les courtes vidéos incisives qui ont un fort impact. Ils exigent des plateformes des contenus qui répondent à leurs besoins, et sont de moins en moins attirés par les messages unidirectionnels des annonceurs qui ne cherchent qu’à vendre leurs produits. Les dépenses publicitaires ont ainsi été redirigées, au point que les campagnes numériques sont devenues une part substantielle des budgets publicitaires, remplaçant les supports papiers, comme on peut le voir sur le graphique :
Pour les marques, les défis se sont accompagnés d’opportunités : grâce aux cookies présents sur les sites web, les annonceurs connaissant leurs clients mieux que jamais et peuvent les contacter directement. Ils peuvent ainsi se passer des distributeurs. Cependant, attirer les consommateurs est devenu de plus en plus difficile : en particulier, les membres de la génération Y ont tendance à être moins fidèles à une marque et font généralement preuve de scepticisme à l’égard des messages des grandes entreprises. Ils peuvent rapidement vérifier sur leur téléphone le prix et la qualité des produits, ainsi que l’authenticité du message. Cela ouvre la voie à de nouveaux acteurs pour lesquels les barrières à l’entrée sont moins élevées qu’auparavant. Dollar Shave Club, par exemple, a chamboulé le secteur du rasage uniquement en faisant de la publicité dans les nouveaux médias : moyennant des frais réduits, les consommateurs se font livrer chez eux leurs rasoirs et autres produits de soin personnel, mettant fin à la nécessité de se rendre dans les magasins. Cette innovation a obligé le géant du rasoir Gillette à réduire ses prix de 12 % l’année dernière.
La combinaison d’une forte présence sur les médias sociaux et d’un produit attractif vendu en ligne peut créer un succès immédiat : Halo Top, aujourd’hui le n°1 aux États-Unis de la crème glacée haut de gamme, a été créé il y a seulement six ans. Ses seuls outils promotionnels ont été les plates-formes de médias sociaux et les publicités numériques.
Fusionner pour survivre ?
Les investisseurs prêts à capter les opportunités offertes par ces changements dans les habitudes des consommateurs doivent être conscients que la profonde mutation que connait le secteur de la distribution peut créer autant de gagnants que de perdants. Les défis peuvent toutefois se transformer en opportunités de croissance à mesure que les entreprises cherchent à fusionner ou à acquérir des concurrents (p. ex. l’acquisition de Flipkart par Wal-Mart, le plus grand distributeur indien sur internet de mobiles et d’appareils électroménagers) afin de prospérer ou simplement de survivre.
Les temps sont bien en train de changer.
Intéressé par les opportunités d’investissement dans le secteur de la distribution ? Regarder la brève entrevue entre Stephen Wilson-Smith et Wolfgang Bauer, gérant chez M&G
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Les spéculations selon lesquelles le Japon, où le marché obligataire est traditionnellement un modèle de stabilité, pourrait modifier sa politique monétaire ultra-accommodante ont conduit à une hausse des rendements de la plupart des emprunts d’État des pays développés au cours des cinq dernières séances : des taux plus élevés au Japon pourraient réduire la demande d’actifs internationaux dans la mesure où les milliards de yens qui ont fui la politique monétaire synonyme de rendements négatifs du pays il y a deux ans pourraient maintenant rentrer chez eux. Le démenti du bien-fondé de ces spéculations par la Banque centrale n’a pas empêché la réaction qui a fait progresser le yen de 1,6 % face au dollar américain et a fait de l’emprunt d’État américain à 30 ans la classe d’actifs la moins performante parmi les 34 suivies par Perspectives hebdomadaires.
Les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine et entre les États-Unis et l’Europe ont également pesé sur les marchés obligataires internationaux en entraînant une baisse du billet vert et du yuan ; la devise chinoise est presque tombée à 6,8 yuans pour 1 dollar, son plus bas niveau en plus d’un an. Malgré la baisse généralisée du dollar américain, la plupart des indices des marchés émergents n’ont pas profité de l’appréciation de leurs devises dans la mesure où les pays émergents continuent de pâtir des menaces d’une guerre commerciale. Les flux nets de capitaux à destination des Exchange Traded Fund (ETF) en Amérique latine ont été négatifs au cours du mois dernier, mais sont restés positifs en Asie-Pacifique. Depuis le début de l’année, ils sont positifs dans les deux régions.
Le haut rendement a été l’une des rares classes d’actifs obligataires à offrir des performances positives au cours des cinq dernières séances, principalement aux États-Unis et en Asie. Les bénéfices des entreprises américaines ont jusqu’à présent généralement excédé les attentes, alors même que les défauts devraient diminuer : selon Moody’s Investors Service, le taux de défaut aux États-Unis et en Europe a reculé à 2,9 % au dernier trimestre et pourrait tomber à 2,1 % d’ici la fin de l’année. L’état d’esprit positif à l’égard des entreprises asiatiques à haut rendement a été favorisé par la nouvelle batterie de politiques budgétaires de la Chine destinées à soutenir son économie qui a été annoncée plus tôt cette semaine.
En hausse :
Rendement de l’emprunt d’État américain à deux ans – une marge de sécurité confortable : la vigueur des bénéfices des entreprises et la détermination de la Banque centrale à relever ses taux ont propulsé le rendement de l’emprunt d’État américain à deux ans à 2,649 %, son plus haut niveau en dix ans. Après prise en compte de l’effet du relèvement des taux sur les cours des obligations, ce niveau signifie que le rendement à 2 ans doit encore augmenter de 1,4 % avant que les investisseurs américains ne perdent de l’argent, ce qui leur confère une marge de sécurité confortable. Comme l’illustre le graphique, il s’agit là d’un changement majeur par rapport à il y a quelques années, lorsque les rendements obligataires étaient si bas qu’une petite hausse des taux pouvait réduire à néant les performances des investisseurs. Les détenteurs d’emprunts d’État américains à 30 ans ne peuvent pas dire la même chose : les difficultés structurelles de l’accélération de l’inflation, le vieillissement de la population et la forte demande des investisseurs mondiaux en quête de rendement ont contenu les rendements des emprunts d’État américains à long terme, réduisant ainsi la marge de sécurité dont disposent les investisseurs avant de perdre de l’argent. Il n’est pas surprenant que l’adjudication d’emprunts d’État américains à 2 ans de cette semaine, avec un prix fixé synonyme d’un rendement de 2,657 %, ait été le témoin de la sursouscription la plus élevée depuis janvier. La situation pourrait toutefois bientôt changer : selon Richard Woolnough, gérant de fonds chez M&G, la Réserve fédérale américaine pourrait privilégier l’achat d’emprunts d’État américains à court terme et la vente d’emprunts à plus long terme afin de réduire le risque de taux au sein de son propre bilan. La décision aurait également pour effet de pentifier la courbe des taux en incitant les banques à prêter davantage – veuillez vous reporter à l’article de Richard Woolnough : « The reversal of Operation Twist and ramifications for the yield curve. »
Brésil : enfin des bonnes nouvelles sur la dette : Le real brésilien a bondi de 3,3 % face au dollar américain au cours des cinq dernières séances, soit plus que toute autre devise majeure, grâce aux commentaires rassurants du secrétaire d’État aux Finances, Mansueto Almeida, au sujet de la dette du pays. En dépit de la lenteur constante de la croissance depuis la récession de 2015-16, le Brésil est en bonne voie pour éviter, l’année prochaine, d’accroître sa dette pour financer les dépenses actuelles – au lieu de cela, les emprunts seront utilisés pour financer l’investissement, a indiqué Mansueto Almeida. Les propos ont apporté un certain soulagement aux investisseurs, dont les principales sources de préoccupation incluent un déficit budgétaire de 7,8 % du produit intérieur brut et les élections générales d’octobre prochain. A suivre.
En baisse :
Petite-Bretagne : les entreprises internationales se pressent d’émettre en dollar et en euro – pas en livre sterling : Depuis le début de l’année, les sociétés internationales ont émis pour 24 milliards de livres sterling de dette « investment grade » (IG) – des clopinettes par rapport aux montants de 230 milliards et 534 milliards de livres sterling (après conversion) de dette IG émise, respectivement, en euro et en dollar américain. Comme l’illustre le graphique, les émissions IG en livre sterling par rapport à ses concurrentes ont diminué depuis la crise financière de 2007-2008 et ne se sont pas redressées. La création de la zone euro et la mondialisation de la finance ont donné un coup de fouet aux émissions libellées en euros et en dollar, tandis que l’incertitude persistante liée au Brexit fait réfléchir certaines entreprises à deux fois avant d’émettre de la dette en livre sterling – l’absence d’accord sur le Brexit pourrait ébranler la devise et rendre ainsi les obligations en livre sterling moins intéressantes pour les investisseurs. En dépit de ce contexte, les obligations IG en livre sterling sont cependant synonymes d’un gain de 0,4 % sur un an, un chiffre inférieur au +0,8 % de la dette IG en euro, mais supérieur au -0,8 % de la dette IG en dollar. Cela s’explique notamment par le fait que l’indice IG britannique ne reflète pas nécessairement l’économie britannique dans la mesure où il est aussi internationalisé que, par exemple, l’indice FTSE 100 pour les actions et au sein duquel les sociétés réalisent près des deux tiers de leurs chiffres d’affaires à l’étranger.
Lire turque – pas à la fête : les investisseurs n’aiment généralement pas les surprises – comme le sait bien la Turquie. Plus tôt cette semaine, la banque centrale du pays a laissé inchangé de façon inattendue son taux de refinancement à une semaine à 17,75 %, alors que les investisseurs s’attendaient à une hausse ; suite à cette décision, la lire turque a chuté de 3 % face au dollar américain. Le Président Recep Tayyip Erdogan, qui a renforcé sa mainmise sur la Banque centrale, favorise depuis des années des politiques monétaires accommodantes afin de stimuler la croissance. Avec un taux d’inflation de 23 % en rythme annuel, le plus élevé depuis 2003, les investisseurs ont propulsé le rendement de l’emprunt d’État à 10 ans à un niveau record de 17 % en exigeant davantage de rémunération.
Point hebdomadaire sur l’actualité des marchés obligataires. Cette semaine, retrouvez Mario Eisenegger.
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Les cours de la plupart des obligations d’entreprises mondiales ont progressé au cours des cinq dernières journées de trading, des chiffres économiques aux États-Unis supérieurs aux attentes ayant soutenu le dollar et porté les actions vers de nouveaux sommets. En outre, le Fonds monétaire international (FMI) a confirmé ses perspectives de croissance pour les États-Unis tout en réduisant celles pour la zone euro, la Grande-Bretagne et le Japon. L’optimisme propice à la prise de risque s’est en revanche évaporé vis-à-vis de la dette souveraine des marchés émergents. Ce segment de marché a souffert de l’interminable feuilleton des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, le renminbi subissant encore une pression baissière. Les matières premières dans leur ensemble et les devises des pays qui les exportent, en particulier la Chine, ont également été fragilisées.
Aux États-Unis, la vigueur des chiffres de ventes au détail et de production industrielle a eu pour effet d’augmenter l’attente du marché d’un relèvement des taux directeurs en septembre. Cette probabilité a ainsi atteint un niveau record de 92 %, ce qui a poussé les rendements court terme à la hausse. La courbe des taux américaine s’est aplatie, l’écart de rendement entre les T-bonds de 2 à 10 ans se réduisant pour toucher à peine 24 points de base, soit son plus bas niveau depuis août 2007. Malgré les commentaires réitérés sur l’aplatissement continu de la courbe des taux américaine, les observateurs du marché, y compris l’ancien président de la Réserve fédérale américaine Ben Bernanke, ont alerté sur le fait qu’un aplatissement n’était pas une inversion, et qu’il ne faut pas forcément voir dans la forme actuelle de la courbe le signe d’une prochaine récession. La courbe peut être plate et le rester. Au Royaume-Uni, la courbe des taux s’est aussi également aplatie, mais pour des raisons différentes : des chiffres d’inflation plus faibles que prévu pour le mois de juin ont fait baisser la partie longue de la courbe britannique, ce qui a réduit l’attente du marché d’un relèvement des taux directeurs au mois d’août. Cette probabilité est ainsi passée de 91 % en début de semaine à 83%. Dans le sillage de l’annonce d’une hausse surprise des stocks aux États-Unis, le cours du pétrole a chuté de 74 dollars le baril la semaine dernière à 67 dollars.
En hausse :
Les bunds et l’inflation – des trajectoires opposées : Les rendements des emprunts d’État allemands ont continué de s’écarter des niveaux de l’inflation européenne. Cette divergence suscite des inquiétudes sur la crédibilité de la courbe allemande, en tant que référence européenne, à refléter les niveaux futurs des taux d’intérêt. Alors que l’inflation de la zone euro s’est hissée à un taux annualisé de 2 % (soit la cible de la Banque Centrale Européenne (BCE) et le plus haut niveau atteint depuis plus d’un an), les rendements du bund allemand ont continué de stagner à des niveaux négatifs, ce qui a encore augmenté l’écart entre les deux mesures, comme on le voit sur le graphique. Certains observateurs du marché, tels que le gérant Wolfgang Bauer chez M&G, considèrent que l’inflation européenne positive, les perspectives de croissance, et la réduction du plan de relance monétaire de la BCE pourraient ramener les bunds vers des niveaux plus conformes à l’orientation de l’inflation – lire l’article rédigé par Wolfgang « Est-ce le moment de vendre le Bund ? » pour en savoir plus.
Catégorie CCC : Une recherche imprudente de coupons ? Les obligations américaines les moins bien notées (CCC) ont gagné 0,3 % au cours des 5 dernières séances de négociation, soit davantage que tout autre segment d’obligations d’entreprises. Ces gains sont en grande partie attribuables à la recherche effrénée de rendement à l’échelle mondiale : Les obligations américaines notées CCC offrent actuellement un rendement moyen de 8,6 %, soit davantage que les 6,4 % de rendement moyen de la catégorie non « investment grade » ou que les 4 % offerts par la dette américaine « investment grade ». En comparaison, les emprunts d’État allemands et japonais à 10 ans n’offrent que de maigres rendements, respectivement 0,3 % et 0,03 %. Un faible taux de défaut a également soutenu la progression du segment CCC : le taux de défaut moyen calculé par Moody’s sur les 12 derniers mois pour les obligations américaines de catégorie spéculative a chuté à 3,4 % en juin, contre 4,0 % en mars.
En baisse :
Le renminbi, le cuivre, le peso mexicain – blessures de guerre : La devise chinoise a chuté pour atteindre une parité de 6,72 unités contre dollar, soit son niveau le plus bas depuis presque une année. La monnaie chinoise a souffert de l’annonce des nouvelles barrières douanières que les États-Unis ont l’intention d’imposer à l’importation de produits chinois. Les tensions commerciales sont devenues le défi n°1 pour la croissance mondiale, qui pourrait être réduite de 0,5 % selon l’avertissement lancé cette semaine par le FMI. Un ralentissement en Chine pourrait nuire aux principaux exportateurs vers le géant asiatique, y compris les grands producteurs de matières premières (voir graphique). Le cuivre, un composant essentiel des moteurs et des câblages, a plongé de 2,9 % au cours des cinq dernières séances de négociation, ce qui porte sa baisse sur un mois à -12 %. Le Chili, l’un des principaux producteurs de ce métal, a vu sa devise reculer de 1,6 % sur la même période, soit la troisième pire performance d’une devise émergente par rapport au billet vert. Cependant, certains observateurs du marché considèrent que l’impact de la guerre commerciale sur la Chine n’est peut-être pas aussi mauvais qu’attendu car l’empire du milieu est en train de modifier son modèle économique pour qu’il dépende davantage de la consommation intérieure, et moins de l’activité manufacturière et des exportations. L’économie chinoise a progressé de 6,7 % au deuxième trimestre, soit un rythme conforme à nos attentes.
La livre sterling – une histoire d’inflation et d’intrigues à Westminster : La devise britannique a reculé de 1,7 % par rapport au dollar au cours des cinq dernières séances de négociation, pénalisée par une inflation inférieure aux prévisions en juin et par la reprise des tensions politiques. Un peu plus tôt cette semaine, grâce à l’appui d’un petit groupe dissident de députés travaillistes, Theresa May a pu faire adopter de justesse son plan sur le Brexit par le Parlement. Dans ce contexte, les prix de l’immobilier à Londres ont continué de baisser : ils ont reculé de 0,4 % en mai, soit leur quatrième mois consécutif de baisse.
Point hebdomadaire sur l’actualité des marchés obligataires. Cette semaine, retrouvez Stephanie Betts.
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Les actifs obligataires risqués traditionnels, tels que les marchés émergents et le haut rendement, ont rebondi au cours des cinq dernières séances, restant ainsi indifférents à l’intensification des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine. La première puissance économique mondiale a annoncé son intention d’imposer des tarifs douaniers supplémentaires sur 200 milliards de dollars de marchandises chinoises, après les 34 milliards de dollars déjà entrés en vigueur vendredi. La liste de près de 200 pages de marchandises, qui inclut notamment les poissons vivants, les antiquités et les portes en bois, a suscité de nouvelles inquiétudes à l’égard des exportations de la Chine et a fait tomber le yuan à 6,67 dollars américains, son plus bas niveau en près d’un an. Les marchés chinois de la dette et des actions ont souffert, en particulier le marché à haut rendement (voir ci-après).
L’intensification des tensions commerciales n’a toutefois pas empêché les marchés émergents de rebondir fortement, aidés notamment par la baisse du dollar. Le billet vert a chuté suite à la publication du rapport sur l’emploi américain de vendredi qui a fait apparaître une situation mitigée de l’économie : si les créations d’emplois ont été plus fortes que prévu, la croissance du salaire horaire moyen est ressortie inférieure aux attentes, ce qui a conduit à une baisse des points morts d’inflation et des probabilités implicites du marché à l’égard des futures hausses des taux. Les devises émergentes se sont envolées, en premier lieu le peso mexicain qui a bondi de 2,7 % face au dollar après que le Président nouvellement élu Andrés Manuel López Obrador ait annoncé la tenue de réunions avec des responsables américains afin de discuter de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Monsieur López Obrador a également noué le dialogue avec des chefs d’entreprise et s’est engagé à maîtriser les déficits du pays.
Toutefois, les marchés des matières premières ont été touchés par l’intensification des guerres commerciales, à l’instar du cuivre dont le prix a reculé de 2,45 % au cours des cinq dernières séances (se reporter ci-après). La lire turque n’a pas non plus été épargnée : elle a concédé 2 % face au dollar américain suite au creusement du déficit de la balance courante du pays et après que le Président Recep Erdogan se soit arrogé de nouveaux pouvoirs afin de désigner le gouverneur de la Banque centrale et ait nommé son gendre au poste de ministre des Finances. La livre sterling a progressé de 0,5 % face au dollar américain au cours des cinq dernières séances, épargnée par les récentes turbulences politiques (se reporter ci-après). La Banque du Canada a procédé à la seconde hausse de ses taux d’intérêt cette année en les relevant d’un quart de point à 1,5 %.
En hausse :
Spreads de crédit des entreprises chinoises – suffisamment élevés ? L’écart de rendement entre les obligations d’entreprises à haut rendement chinoises et les emprunts d’État américains a continué de s’élargir en juillet pour atteindre 367 points de base, son plus haut niveau depuis avril 2015, date à laquelle la banque centrale abaissait ses taux afin d’enrayer le ralentissement de la croissance. La récente évolution témoigne des inquiétudes grandissantes des investisseurs à l’égard de la baisse de 5,3 % du yuan face au dollar américain au cours des trois derniers mois et des conséquences des nouvelles barrières commerciales américaines sur les exportateurs chinois. La lutte en cours dans le pays visant à réduire les niveaux d’endettement, l’appréciation du billet vert et la hausse des taux d’intérêt outre-Atlantique ont également conduit les investisseurs à exiger une rémunération plus élevée pour le risque. Les spreads ont désormais atteint un niveau qui, pour certains, pourrait être assez élevé afin d’acheter à la faveur de tout éventuel repli. L’économie chinoise est également en bonne voie pour atteindre son objectif de croissance d’environ 6,5 % cette année, grâce principalement à la consommation intérieure – par exemple, le pays vend plus de voitures sur le marché intérieur que les États-Unis. La croissance pourrait également être moins handicapée par une guerre commerciale qu’on ne le croit souvent : si l’excédent de la balance courante représentait 10 % du PIB en 2007, il est à peine de 1 % à l’heure actuelle. Une croissance économique plus tirée par le marché intérieur pourrait également soutenir des secteurs économiques de premier plan tels que l’immobilier. Toutefois, l’industrie de l’immobilier résidentiel est en phase de reprise suite à une période difficile liée à des inquiétudes liées aux niveaux non viables atteints par les prix et à l’augmentation du taux de défaut. Pour autant, davantage de défauts sont parfois considérés comme positifs dans la mesure où ils améliorent la crédibilité du pays, et ce, au moment même où la Chine prévoit d’ouvrir ses marchés du crédit aux investisseurs internationaux.
La Coupe du monde, la météo et le mariage royal relèguent au second rang la crise politique : la croissance revient à la maison. La livre sterling a progressé de 0,6 % face au dollar américain au cours des cinq dernières séances, insensible aux démissions du ministre chargé du Brexit et du ministre des Affaires étrangères du pays. La devise a été plus sensible à la croissance économique qui s’est établie à +0,2 % au cours du trimestre clôturé en mai et à l’amélioration des chiffres des dépenses des ménages : le beau temps, le récent mariage royal et le succès de la Coupe du monde ont contribué à une hausse des dépenses des ménages de 5,1 % sur 12 mois en juin. L’optimisme a propulsé à 82 % la probabilité implicite du marché d’un relèvement des taux en août, le plus haut niveau depuis avril.
En baisse :
Obligations à haut rendement et « investment grade » américaines : découplage. Après des mois d’évolution parallèle, un découplage entre la dette à haut rendement et « investment grade » américaine a commencé à s’opérer au deuxième trimestre de l’année. Toutefois, ce ne sont cette fois-ci pas tant les spreads des titres à haut rendement qui se sont envolés, mais bel et bien ceux traditionnellement plus stables et calmes des titres « investment grade ». Cette évolution a été favorisée par l’abondance de l’offre d’obligations « investment grade », laquelle a eu pour effet d’accroître la prime exigée par les investisseurs, et par la pénurie d’émissions à haut rendement, les investisseurs étant plus réticents à acheter des émissions insuffisamment rémunératrices. Le crédit « invesment grade » américain pâti également d’une dégradation de la qualité : les entreprises notées BBB (le rang « invesment grade » le plus bas) représentent désormais la moitié de la classe d’actifs, contre 34 % en 2006. Avec les « loans » américains, les obligations indexées sur l’inflation britanniques et les obligations des marchés émergents, la dette à haut rendement américaine est l’une des classes d’actifs les plus performantes en 2018 – elle a progressé de 3,2 % au cours des 12 derniers mois, survivant ainsi aux guerres commerciales, aux soubresauts politiques en Italie et à un environnement général de hausse des taux d’intérêt. Toutefois, certains observateurs de marché affirment que le haut rendement aux États-Unis pourrait apparaître onéreux et pourrait continuer à l’être en raison d’une offre qui devrait demeurer limitée dans la mesure où peu de fusions-acquisitions sont attendues et les opérations de refinancement importantes ont déjà été réalisées, ainsi que de la forte concurrence du marché des « loans ». Les « loans » à taux variable sont devenus de plus en plus populaires compte tenu des vertus protectrices contre la hausse des taux qui leur sont conférées par les investisseurs. Les guerres commerciales actuelles ont également contribué à creuser l’écart entre les obligations « investment grade » et à haut rendement, les émetteurs à haut rendement ayant tendance à être davantage focalisés sur le marché intérieur et moins internationalement exposés. Pour combien de temps ?
Les matières premières – pénalisées par Trump. Le cuivre, l’argent et le palladium ont figuré parmi les matières premières dont les prix ont concédé du terrain au cours des cinq dernières séances, victimes de l’intensification des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine. Les métaux ont été doublement pénalisés : ils sont inclus dans la dernière liste des produits encourant de nouveaux tarifs douaniers de la part des États-Unis et ils pourraient faire les frais d’une possible baisse de la demande de la Chine, le plus gros pays consommateur de matières premières au monde au cours de la dernière décennie. Les devises des pays exportateurs de matières premières se sont dépréciées : le peso chilien a perdu 0,3 % au cours des cinq dernières séances face à un dollar en baisse en raison des craintes d’une diminution de ses exportations de cuivre.
Point hebdomadaire sur l’actualité des marchés obligataires. Cette semaine, retrouvez Wolfgang Bauer.
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Point hebdomadaire sur l’actualité des marchés obligataires. Cette semaine, retrouvez Pilar Arroyo.
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